26 févr. 2013

C'est pas de la com !

(une des nombreuses séances de travail pour Bordelaises)

La presse féminine, j'en lis des kilos. J'avoue. J'ai feuilleté/acheté à peu près tout ce qui peut se faire. Et je continue de sauver les finances des groupes de presse en consommant ELLE, Vogue, Grazia, Marie-Claire, Causette, Glamour and co. J'adore leur légèreté et j'assume. J'apprécie l'esthétisme, les belles choses qu'on y voit, les idées que ça suscite, la curiosité que ça éveille, l'air du temps que ça souffle. Mais je souffre souvent de leur manque d'engagement. La dernière page avalée, je suis frustrée. De ne pas toujours souvent me reconnaître dans le portrait de la femme qui est brossé, de ne pas vibrer, de ne pas y voir ma génération. Souvent, on frôle même le scandale tant la presse qui devrait tant nous défendre, nous renvoie à nos propres contraintes et avilissements. Parfois, on tombe dans l'excès inverse et on a presque honte d'aimer les futilités. Bref, mon magazine parfait n'existe toujours pas.

C'est de ce constat qu'est née l'aventure "Bordelaises". En septembre dernier, lors d'une conférence de presse, nous étions quatre filles, quatre journalistes indépendantes à "râler" face à ce manque, à brûler d'envie de créer enfin un mag qui nous ressemble, qui nous parle. Qui montre qu'on a toutes les épaules assez larges (n'en déplaise à un avocat bordelais pathétiquement célèbre). La mairie de Bordeaux a tendu l'oreille et nous a dit "banco", et surtout "carte blanche", pour un numéro spécial femmes pour le 8 mars. Faites-le, le magazine de vos rêves ! Forcément, c'était tentant. Comme mes collègues, j'ai beaucoup réfléchi avant de me lancer. Car travailler pour une municipalité n'est évidemment pas anodin. Etre rédacteur pour une publication municipale ne veut pas dire être journaliste. Et utiliser sa plume de professionnel pour de la communication ne peut pas être du journalisme. Face à cela, nous devons tous être terriblement vigilants, devant notamment à la multiplication de supports mi-info/mi-com, aux frontières floues, et alimentées de bonne grâce par des journalistes qui ont besoin de manger, de vivre, de travailler. De l'alimentaire, des ménages, de la com déguisée et grassement payée, ça existe, tout le monde le sait, pas mal de monde le fait. De cela, il n'était pas question pour moi. Evidemment, j'ai entendu que j'étais passée de l'autre côté (le côté obscur des méchants de la grande manipulation intellectuelle), que je ne pourrais pas faire du journalisme avec la mairie, que je devrais forcément me plier aux exigences de la structure, qu'un tel engagement un an avant des élections municipales était pure folie, que ma carte de presse allait souffrir, et moi avec. Beaucoup d'interrogations, légitimes et logiques.

Je me suis également posé ces questions. Mais je peux dire aujourd'hui et sans rougir que nous avons fait un travail de journaliste. Pour couper court aux râleurs, mauvais pensants, sceptiques et critiques faciles, voilà comment cela s'est passé : c'est la mairie qui a géré la pub, le graphisme, l'édition, la partie commerciale. C'est l'équipe composée des quatre journalistes féminines qui a proposé les sujets. Nous n'avons subi aucune censure, quelques idées ont été retoquées, d'autres discutées, ni plus ni moins que dans un journal classique. Nous avons mené nos reportages, entretiens sans que la mairie n'intervienne d'aucune façon, ni dans les interlocuteurs choisis, ni dans les angles d'article retenus. Aucun mot, aucune virgule n'a été changé. Nous nous sommes investies, beaucoup, et avons travaillé avec autant de liberté que nous l'avons souhaité et demandé dès le début. Peut-être plus que pour certaines publications pour lesquelles j'ai déjà écrit. A aucun moment, je n'ai eu l'impression, la sensation de travailler pour un outil de communication politique. Alors certes, je ne suis pas naïve, enfin je me soigne alors je le suis moins. Je suis bien consciente que la mairie a trouvé et trouvera sa part et son bénéfice, notamment en terme d'image, dans un tel projet. De mon côté, j'ai pris du plaisir à le faire, à rencontrer des femmes exceptionnelles, passionnantes. Comme nous le disons dans l'édito, ce n'est sans doute pas le magazine parfait. Celui-là trône encore quelque part au fond de ma tête. Mais c'est un joli projet mené avec coeur par une troupe de filles motivées. Qui a une certaine idées des femmes et du féminisme. Qui parle de vous, je l'espère, et puis un peu aussi de nous toutes.
Ecrire pour une mairie, une collectivité, une agence de com, ça ne DOIT pas être la règle, le réflexe un peu facile et gagne-pain de notre métier, qui doit rester farouchement indépendant. Mais ce fut une jolie exception.

Et puis tant qu'on y est, et puisqu'il paraît que les réseaux de femmes fonctionnent particulièrement bien à Bordeaux, je vous invite à venir découvrir et récupérer Bordelaises demain mercredi 27 février de 17h à 19h à l'Hôtel de Ville de Bordeaux. C'est une belle occasion de rencontrer du monde, d'échanger entre filles mais pas que. C'est ouvert à tou(te)s et j'espère bien vous y croiser !

A bientôt,

Pau.

ps : Bordelaises, c'est gratuit, à partir du 27 février, à venir chercher en mairie ou autres lieux municipaux.

9 commentaires:

  1. Super, je vais demander à ma mère de courir le récupérer!
    Il n'y a effectivement pas à rougir. Je dirais même que le travail avec une "institution" peut être très instructif. Il permet de se poser des questions que l'on ne s'était pas forcément posées en tant que journaliste.
    Hâte de lire Bordelaises, à bientôt!

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    1. Merci Elodie, c'est sympa ! Si ta mère ne le trouve pas, je t'en mets de côté !
      C'est vrai que cette aventure m'a permis de me poser plein de nouvelles questions, c'était vraiment intéressant. Je suis contente que nous ayons pu mener tout ça avec beaucoup de liberté. Mais ça restera exceptionnel ! J'espère que tout va bien pour toi, bises.

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  2. Comme dit le proverbe : "on n'est jamais aussi bien servi que par soi-même", alors bon vent à votre magazine les filles ! Ca va marcher j'en suis sûr !

    Tiens, et si nous aussi les hommes on faisait nous aussi notre magazine...?

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  3. Merci Philippe ! Que de nouveaux projets partout à Bordeaux ;-)
    Super bonne idée pour le mag pour les hommes, j'en connais un qui serait bien partant ! Et si vous avez besoin d'une "consultante" féminine......

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  4. J espérais pouvoir venir mais je pars pour Paris trop tôt - bon lancement et plein de belles choses pour cette nouvelle aventure !

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    1. Dommage Anne, les Bordelaises seront déçues de ne pas croiser leur célèbre représentante culinaire ;-)
      Merci en tout cas, et bises.

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  5. Il est genial ce magazine! J'ai adoré!
    Melissa

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  6. Ce blog creve à petit feux, faudrait publier un peu mme Afleur.

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